Suzanne Tacquet est née à Abbeville (Somme), le 23 septembre 1893. Elle est la fille d'Ernest Tacquet, docteur en médecine à Abbeville, et de Céline Vincent.

Dès 1912, elle rédige un journal intime qu'elle tient à jour durant la Grande Guerre.

Ce journal met en lumière la vie quotidienne des populations civiles à Abbeville et à Cayeux-sur-Mer à la veille et pendant la Grande Guerre : les joies, les rencontres, le quotidien, puis soudain l'inquiétude d'une guerre imminente suivie des peurs et angoisses d'un front qui se rapproche, le décor d'une ville devenue un immense casernement pour les troupes anglaises, l'annonce de la mort de jeunes hommes de leur entourage, l'espoir, etc.

Ce journal permet aussi de suivre le parcours d'un jeune soldat, Lucien Thiébaut d'Anizy-le-Château, dont la marraine de guerre n'est autre que la femme du docteur Tacquet. Les deux soeurs, Suzanne et Magdeleine, se prennent d'affection pour ce jeune et brave soldat dont elles parlent régulièrement dans leur journal de bord.

Lucien Thiébaut est né le 15 juin 1894 à Anizy-le-Château. Domestique de ferme, il est le fils de Jules Thiébaut et de Julia Fétizon. Il est incorporé en septembre 1914, au 3e Régiment de Cuirassiers, puis passe au 43e Régiment d'Infanterie en octobre 1914 avant de rejoindre le 156e Régiment d'Infanterie le 4 janvier 1915. Le 11 août 1916, il est décoré de la Médaille Militaire pour sa bravoure au combat. Il meurt au combat le 16 avril 1917 à Moussy (Aisne). Il décoré de la Croix de Guerre avec Palme à titre posthume.

Voici quelques extraits choisis de son premier carnet :

- Jeudi 30 juillet [1914] : Toujours beau. Les cayolais sont affolés et affolent les autres (baigneurs), beaucoup quittent Cayeux. La guerre est imminente paraît-il ! [...]

- 1er août 1914 : Eh bien c'est vrai ! Nous allons avoir la guerre ! La France entière est mobilisée, depuis quatre heure et demie l'ordre est arrivé de mobiliser. Mais c'est effrayant ! Je ne peux m'habituer à cette idée ! Moi qui considérait ce mot comme un vieux mot. Jamais, jamais je n'aurais cru connaître la guerre. Pauvre France. Quel avenir t'es réservé ! [...]

- Mardi 25 août [1914] : Bien voila Abbeville prise de panique ! Les abbevillois sont prêts à se terrer dans leu cave ou partir dans les Pyrénées. Impossible de sortir sans être assiégé par ces paroles "Les Prussiens sont à Lille. lille est en flammes. C'est l'invasion par le Nord". Pour un peu ils ajouteraient demain ils sont à Abbeville [...]

- Mercredi 26 août [1914] : Nous avons eu à loger deux officiers cette nuit. Un capitaine et un lieutenant arrivés d'Arras à minuit [...]. Ils sont simples et aimables. Le lieutenant Dujardin habite Isbergues, il est veuf et son fils vient de partir avec la classe 1914 [...]

- Vendredi 4 septembre [1914] : [...] Tous les jours arrivent des familles d'Albert, de Chaulnes, Péronne, Amiens qui viennent se réfugier momentanément à Cayeux. Plusieurs familles d'abbevillois sont venues aussi échouer ici tels les Riquier, Coulombel, Douchemard, Caudron, Bouffart, Audin, Fontaine, etc. [...]